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Un centre d’excellence pour la cheville et le pied

18 avril 2023

Le Pr Brilhault prépare l’ouverture d’un Centre de la cheville et du pied à la clinique Saint-Léonard : un centre d’excellence qui proposera aux patients toutes les solutions possibles, y compris les plus innovantes.

Le professeur Jean Brilhault est professeur des universités, spécialisé en chirurgie de la cheville et du pied. Il rejoint aujourd’hui la clinique Saint-Léonard qui bénéficiera ainsi de son expertise dans le traitement des pathologies de cet ensemble complexe d’articulations : « un vrai mikado », comme il le résume lui-même.

Pr Brilhault, comment en êtes-vous venu à vous spécialiser dans la chirurgie de la cheville et du pied ?

J’ai étudié la médecine à Angers. J’ai toujours voulu faire de la chirurgie, mais j’hésitais entre la chirurgie plastique ou l’orthopédie. J’ai découvert la chirurgie orthopédique au cours de mon stage de médecine générale, quand mon responsable m’a emmené au CHU [centre hospitalo-universitaire] de Tours. Cette spécialité, exercée par des médecins qui parviennent à modéliser le corps, avec une dimension d’ingénierie, m’a attiré. Entre la chirurgie plastique qui privilégiait la forme, et l’orthopédie qui privilégiait la fonction, j’ai choisi la fonction.

Quand j’ai été reçu à l’internat, j’ai choisi chirurgie à Tours. Je croyais que mon rang de classement me permettait de choisir. Mais mon « patron » [chef de service], le Pr. Burdin, m’a expliqué que non : « c’est nous qui allons voir de quoi tu es capable ». Ça s’est finalement bien passé, puisque j’ai fait mon internat dans la prestigieuse École de chirurgie orthopédique de Tours. Au cours de ma formation, j’ai parallèlement réalisé un cursus scientifique : DEA(M2R) puis thèse de sciences (d’université).

Certaines rencontres ont-elles particulièrement marqué votre parcours ?

Je nommerai trois personnes qui ont fortement structuré ma pratique de la médecine telle qu’elle est aujourd’hui :

Le Pr. Philippe Burdin, mon mentor, m’a donné le goût de cette discipline à laquelle il m’a formé. A la fin de mon internat, alors que j’étais lauréat d’une année supplémentaire de formation dite « de médaille d’or », il m’a conseillé de m’intéresser au pied et à la cheville, un secteur encore peu exploré. Je savais que le pied était au bout de la jambe, mais c’était à peu près tout. Je me suis donc lancé dans cette thématique assez neuve, sur laquelle on avait moins de recul que sur la hanche et le genou. Au cours de mon stage à Rouen, chez le Pr. Norman Biga, j’ai découvert la chirurgie du pied et de la cheville, et profité de la très belle bibliothèque du service pour lire à peu près tout ce qui avait été écrit d’important sur le sujet en français et en anglais. Cela m’a passionné.

Le professeur Niek van Dijk, que j’ai rencontré en 2014 et avec lequel j’ai donné des cours à l’étranger. Ce nom reconnu de la chirurgie de la cheville, notamment du sportif, a fondé l’école de la cheville d’Amsterdam et m’a beaucoup influencé. Il m’a convaincu de la nécessité d’innover et d’enseigner. 

Mon épouse, le Pr Frédérique Bonnet-Brilhault, l’amour de ma vie, que j’ai rencontré sur les bancs de la faculté de médecine d’Angers. Elle est pédopsychiatre et professeur des universités en physiologie au CHU de Tours. Elle a un rapport aux êtres humains et au monde que je lui envie, moi qui suis souvent plus à l’aise avec les choses qu’avec les personnes. 

La vie est faite de rencontres, et celle de ces trois personnes a été déterminante. Leur pensée est différente de la mienne, et d’autant plus éclairante. Je me suis efforcé de m’enrichir de chacune d’entre elles.

Vous êtes devenu chercheur, en même temps que médecin ?

Quand je suis devenu chef de clinique à Tours, j’ai fait de tout en chirurgie orthopédique : le rachis, la main, la hanche, le genou, le pied, la cheville etc … Après mon clinicat, j’ai passé le concours du Conseil National Universitaire (CNU) et ai obtenu le grade de maître de conférences des universités en chirurgie orthopédique. J’ai été le premier maitre de conférences de la discipline … ce qui ne signifie pas que j’étais le meilleur !

Une fois ma thèse de sciences soutenue, j’ai poursuivi mes études en post-doc aux États-Unis, initialement  sur la chirurgie du genou. J’ai rencontré des chirurgiens du pied et la cheville à l’hôpital général de San Francisco, avec lesquels j’ai sympathisé et qui m’ont poussé à publier dans le prestigieux journal américain de la discipline, Foot & Ankle International. Lors de mon second séjour aux États-Unis, j’ai d’ailleurs été reçu comme professeur invité de la discipline. Du genou, j’étais tombé au pied et à la cheville… Comme me l’a dit le Pr. Burdin, je ne pouvais pas tomber plus bas. Plus sérieusement, je me suis passionné pour cette mécanique des articulations de l’extrémité du membre « portants » que sont les articulations du pied et de la cheville [par opposition au membre porté qu’est le membre supérieur].

Une fois passée mon Habilitation à diriger les recherches (HDR), j’ai passé le concours du CNU pour obtenir le grade professeur des universités et ai été nommé professeur des universités-praticien hospitalier (PU-PH) à la faculté de médecine et au CHU de Tours en 2012. En 2020, j’ai pris la chefferie de service et ai réuni les deux services de chirurgie orthopédique du CHU en un seul service … et le Covid nous est tombé dessus !

Aujourd’hui, mon activité porte principalement sur les articulations de la cheville et de l’arrière-pied. C’est un ensemble de plusieurs articulations, qui relaye les contraintes qui s’exercent entre la jambe et le sol pour transmettre les forces de propulsion et permettre la marche, la course.

Mes thématiques principales sont l’arthrose, les déformations, qu’elles soient acquises par l’arthrose ou neurologiques. Je fais aussi de la neuro-orthopédie. J’ai été la personne en France qui posait le plus de prothèses de la cheville, jusqu’à 80 par an. Nous sommes deux en France, avec le Dr. JL Besse des Hospices civils de Lyon, à être aussi spécialisés dans cette procédure.

Comment a émergé l’idée de la création d’un centre de la cheville et du pied à la clinique Saint-Léonard ?

Le but de ce centre est d’offrir un panel de soins relativement complet aux patients concernant les pathologies du pied et de la cheville. Il existe d’autres centres de ce type ailleurs en France et en Europe, mais j’ai constaté que les patients avaient souvent du mal à obtenir une information claire sur leur pathologie et les alternatives thérapeutiques. Il arrive trop fréquemment que l’option proposée et finalement réalisée soit liée à la maîtrise d’une technique chirurgicale plutôt qu’à ce qui bénéficierait le mieux au patient. Dans notre centre, nous souhaitons pouvoir proposer le panel thérapeutique le plus étendu et adapté possible au bénéfice de la santé des patients.

Ces dernières années, à l’hôpital public, les problèmes d’offres de soins – aggravés par la crise du Covid – ont réduit la place de la chirurgie fonctionnelle, non urgente et non vitale. Je me suis donc tourné vers le secteur privé pour créer un centre de la cheville et du pied. À la clinique Saint-Léonard, j’ai trouvé l’adhésion et l’offre opératoire dont j’avais besoin.

Le fait que la clinique Saint-Léonard appartienne à ses médecins est déterminant : on ne dialogue bien qu’avec des personnes qui ont la capacité de dire oui (celle de dire non étant assez répandue…) À la clinique, j’ai rencontré des collègues qui sont à même d’investir dans leurs structures de soins. Ce paramètre a été déterminant dans mon choix.

Comment va s’organiser le centre de la cheville et du pied ?

J’y apporte mon expertise de l’arthrose du pied, de la cheville, des déformations, et invite des collègues à me rejoindre pour la chirurgie de l’avant-pied, la chirurgie du sportif, les tendons et les ligaments autour de la cheville. Le Dr Claire Nicot, actuellement chef de clinique au CHU d’Angers, doit nous rejoindre en janvier 2024.

Mon but est de former, à terme, un groupe de trois chirurgiens (équivalents temps plein, ou davantage de personnes à temps partiel), un(e) médecin du sport, un(e) podologue et un(e) infirmièr(e) spécialisé(e) dont l’activité serait entièrement dédiée à la médecine et la chirurgie de la cheville et du pied.

Nous aurons 300 mètres carrés de locaux au deuxième étage de la clinique et nous profiterons des équipements du bloc opératoire de la clinique. J’aimerais aussi investir dans un appareil de radio particulier : un cone beam, qui permet de faire des radios en 3D sur une personne debout : c’est-à-dire quand le poids du patient repose sur son pied et sa cheville. Nous opérons des bipèdes, aussi est-il important de voir l’articulation « en charge ». Cet appareil peu irradiant est fréquemment utilisé en chirurgie dentaire, mais encore peu en orthopédie. Il permettra de comprendre au mieux ce qui dysfonctionne parmi les 28 articulations du pied.

Quels types de traitements et de soins proposerez-vous ?

Les procédures classiques sont celles de la chirurgie des déformations et de l’arthrose de la cheville, du pied et des orteils qui corrigent les déformations osseuses et bloquent certaines articulation afin de restituer un pied indolore et stable… c’est-à-dire fonctionnel. Ces procédures peuvent être réalisées par abord direct (en ouvrant la peau) ou au travers de la peau (ou mini-invasif) sous contrôle radioscopique ou arthroscopique [l’arthroscope est un appareil d’optique miniature introduit dans une articulation, à travers une petite incision cutanée].

Parmi les procédures plus innovantes, on compte la chirurgie prothétique de la cheville et la chirurgie conservatrice. Nous réaliserons des arthroplasties biologiques, c’est-à-dire la « rénovation » de l’articulation de la cheville quand cela est encore possible afin de la rendre à nouveau fonctionnelle sans avoir recours aux articulations artificielles que sont les prothèses. De telles procédures sont actuellement plus développées en Asie qu’en Europe. Elles permettent de conserver l’articulation native le plus longtemps possible dans l’espoir que nous puissions à l’avenir combiner ces techniques à des thérapies néo-adjuvantes qui permettront de recréer du cartilage articulaire.

Comment envisagez-vous l’avenir de la chirurgie de la cheville et du pied ?

L’avenir est à la conservation des articulations et du mouvement. Une grande partie de la chirurgie du pied et de la cheville est stabilisatrice, mais au prix d’un raidissement du mouvement. Aujourd’hui, on privilégie la fonction de stabilité, alors qu’on pourrait aussi par différentes solutions biologiques ou non, prothétiques ou non, faire perdurer le mouvement.

Pour cette raison, nous visons l’excellence dans la recherche également. Nous comptons poursuivre la clinique et l’évaluation des nouvelles techniques, la compréhension des pathologies et le traitement de l’arthrose de la cheville. Je conserve mon habilitation à diriger des recherches, et participerai toujours en tant qu’enseignant et encadrant de mémoires au diplôme inter-universitaire national de chirurgie du pied et de la cheville.

Quelles relations sont prévues avec le CHU d’Angers ?

Je connais bien le CHU, pour y avoir fait mes études, puis pour y être venu tous les trimestres depuis 5 ans dans le cadre d’une convention entre le CHU de Tours où j’exerçais et le CHU d’Angers. Le futur professeur agrégé d’orthopédie du CHU d’Angers, actuellement maître de conférence, le Dr Louis Rony, a une thématique pied & cheville ce qui fait que nous collaborons régulièrement et avons d’ailleurs publié ensemble à plusieurs reprises. J’espère que notre collaboration avec le CHU perdurera, sur le plan humain comme sur le plan matériel.

En effet, le but du centre de la cheville et du pied est de diffuser une offre principalement de soin, mais aussi d’enseignement et de recherche. Nous souhaitons en faire, plus qu’un centre de compétences, un centre d’excellence. Mais ça, c’est à nous de le prouver !

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